Yo !

Yo ! Bienvenue dans le blog d'une future prof... J'y raconte ici ma vie sous toutes les facettes, celle d'étudiante, d'animatrice, de prof et de jeune adulte. Vous verrez les hauts les bas de l'enseignement...et de ma vie.


vendredi 30 juillet 2010

La ballerine

Voici un petit texte que j'ai écrit lorsque j'étais en crise. Avec le recul, je l'ai un peu retravaillé, mais j'en suis très fière.

La ballerine




Ma tête est vide. Ma tête est vide. Ma tête est vide. C’est ce dont j’essaie de me convaincre pour m’endormir. Pour empêcher les monstres de venir me visiter. C’est impossible. J’échoue à chaque fois. Plus je me convaincs, plus ma tête s’alourdit et les monstres arrivent en force. Et je ne sais plus quoi faire pour les repousser. Ils m’agrippent, me griffent, me déchirent. Ils me percent, psychologiquement et physiquement. Ils inscrivent leurs pensées en moi. Avalée, je me sens avalée. Ils me dévorent. Ils connaissent mes ruses, et fermer les yeux en remontant les couvertures ne suffit plus. C’est dans cette douleur que je m’endors, toutes les nuits. Lorsqu’ils acceptent de me laisser dormir. Je me débats, je mords, je griffe, je rends les coups. Ils sont plus nombreux de nuits en nuits. Alors j’abandonne, je me laisse vaincre. Je suis comme Tytios, condamnée à me faire dévorer pour l’éternité. Le matin, je me réveille, en nage, affolée. Une autre journée doit recommencer. Alors, je mettrai mon collier porte bonheur, ma première action du matin, sans ce collier, je n’entends rien. Ne vois rien et ne fais rien. Comme les personnes myopes qui entendent mal sans leurs lunettes. Avec ce collier, je me remets de mes émotions de la nuit. Je regarderai mon amoureux qu’il me faudra encore convaincre de se lever, pour pouvoir profiter du lit à moi toute seule le temps qu’il sera parti se brosser les dents. Une routine immanquable qui ressemble à une danse. Le climax de cette danse sera dans la douche, que nous prendrons ensemble, il n’y a pas une journée qui ne commence pas comme ça. Avant de m’habiller, je me regarderai dans le miroir et verrai les traces des créatures de la nuit.



Je n’en dirai pas un mot.



À quiconque.



Je m’habillerai en babillant de choses futiles. Quand je parle, cela ressemble à des bulles de champagne, de petites paroles, futiles, agréables et légères. Je saoule rapidement les gens avec. Je les enrobe de mon surplus de paroles et les laisse dériver sur mes non-sens. J’ouvrirai ensuite le rideau, grimperai sur mon calorifère pour voir le temps, ne verrai que les fruits du poirier de dehors et les plates bandes de devant ma chambre. Je supposerai alors qu’il fait soleil, parce ce matin, je ne me sentirai pas si mal.



Plus je prédis ce moment, moins je le vois arriver. Ce matin, je suis brisée. J’éteins mon radio réveil et coupe court aux nouvelles de radio-canada. J’ai beau chercher mon collier, je n’y arrive pas. Je suis brisée. Je ne pourrai pas me lever. Étouffée dans mes oreillers, ligotée dans mes draps, je suis prise au piège. Mon amoureux dort toujours, il est comme un conte, il n’existe pas si on ne fait pas mention de lui, et je ne l’ai pas réveillé, je m’en sens incapable. Je me répète inlassablement cette phrase. Je suis prise au piège. Je ne peux plus bouger. J’ai brisé Sysiphe en moi, mais je ne suis pas plus avancée. Je crie à l’aide, mais mes bulles de champagne restent prisent dans ma gorge. Je lance des regards désespérés à mon amoureux, s’il pouvait se réveiller seul, briser lui-même la malédiction que les monstres lui lancent pour pouvoir me torturer tranquille. Je suis brisée. Il faut me réparer, mais personne d’autre que lui ne le peut. J’asphyxie lentement. Je coule. Ma tête est lourde. Je respire la panique et cela ne remplace pas l’oxygène, je peux le garantir. Je donne des coups pieds, me brûle la gorge à force d’essayer de crier, il n’y arien à faire, je suis incapable d’alerter quelqu’un ou de me lever. Je pense aux poires dehors et j’espère qu’il pleut, parce que je me sens triste et foutue.



Je suis brisée.
Brisée.





Brisée. Brisée. Brisée. Une litanie sans fin harcèle ma tête et marque mes poignets. Brisée...







Sans, souffle, j’essaie de lui crier de me réparer. Rien ne fonctionne.

Après des heures de combat, j’abdique, je suis prête à mourir pour l’éternité. Je me convaincs que ma tête est vide, que les monstres ne survivent pas au soleil ou qu’ils sont allergiques au fait d’être debout à sept heures du matin. Et là, je les sens, sur ma hanche, avec leurs griffes. Je pleurs, je crois, parce jamais mes bulles de champagne n’auront été aussi liquide. Je me prépare à me faire avaler. C’est alors qu’au lieu de croc, je sens des lèvres se poser sur les miennes. Il a rompu seul cette malédiction, comme quoi personne n’est indispensable. Les monstres reculent d’eux même, sans qu’il n’ait à combattre. Le danger écarté, j’essaie de me lever.



J’en suis toujours incapable.

Ses mains agrippent mes hanches. Il me soutient, voit mes marques de guerre. Il m’immobilise sur le lit. Je suis brisée, comme les ballerines qui tournent en rond toute la journée. Il ouvre mon coffre, explore mes rouages. Avec son souffle doux, il enlèvera les poussières qui les bloquent. À coup de baiser, il remettra les rouages en route. Il me flattera le dos, en s’assurant que je ne danse plus en rond. Il partagera son miel, me disant qu’il ne se laisserait plus avoir par le champagne. Après s’être assuré que tous les rouages fonctionnent, il me laissera me lever.

Il jettera le collier, je n’aurai plus besoin de chance. J’irai voir le poirier. Nous déciderons ensemble, qu’aujourd’hui, il fait soleil. Dans notre danse à deux, nous finirons sous la douche. Et nous retournerons sous la couette. Parce que la nuit aura été dure.

 
 
 
 
 
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